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Quand l’histoire bourgeonne et le sirop coule à flots : un circuit de printemps au Québec Authentique

23 mars 2023

Quand l’histoire bourgeonne et le sirop coule à flots : un circuit de printemps au Québec Authentique © Damien Lair
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Des premiers pas de la Nouvelle-France à l’essor des industries qui ont façonné le Québec moderne, les régions du Québec Authentiques sont pétries d’histoire et de traditions. Certaines d’entre elles, comme le temps des sucres, ont des racines plus lointaines encore, le sirop d’érable étant bel et bien un héritage des Premières Nations. Ce printemps, on vous invite à voyager en mode sucré-salé entre les époques et les (grands) espaces de Lanaudière et de la Mauricie. Côté fleuve, dans la campagne et jusqu’en pleine forêt, le sel de l’histoire se récolte de pépite en pépite pratiquement à chaque virage. Quant aux délices sucrés tirés de l’érable, ils sont la récompense de ce road trip printanier s’adressant à tous les « épicurieux ».

Ces souvenirs qui coulent de source au Québec Authentique

La Mauricie et Lanaudière sont aux premières loges de l’histoire du Québec depuis les balbutiements de celle-ci. Et même bien avant, quand on considère que ces vastes territoires arrimés à la rive nord du fleuve Saint-Laurent étaient fréquentés par les Premières Nations depuis des millénaires. Dans la foulée de la fondation de la ville de Québec par Samuel de Champlain au début du XVIIe siècle, les deux régions qui forment aujourd’hui le Québec Authentique ont été les premières à voir se développer la colonie de la Nouvelle-France. Elles connurent l’âge d’or des grandes seigneuries, celui des premiers établissements industriels du pays, sans oublier l’épopée de la foresterie, celles des pâtes à papier, de l’aluminium ou encore de l’hydroélectricité. Associée à l’abondance de leurs ressources en eau et en bois, la position centrale de Lanaudière et la Mauricie entre les deux grands pôles urbains de la province, font de ces deux régions un conservatoire de la mémoire profonde du Québec.

Matériel ou non, qu’il s’admire ou se déguste, un riche patrimoine historique et culturel affleure dans toutes les strates du Québec Authentique: au bord du fleuve tout au long du Chemin du Roy, sur les chemins de campagne, d’une paroisse à une ancienne seigneurie, et jusqu’au cœur de la forêt boréale, dans ces hautes-terres où les humains ont dû faire preuve de génie pour se faire une place. De quoi inspirer une multitude d’escapades à saveur historique… Et pourquoi ne pas faire coïncider votre prochaine virée au Québec Authentique avec la tradition 100% québécoise des cabanes à sucre. Elle aussi s’avère bien vivace par ici, surtout au printemps, quand s’enflamme l’ambiance de ces hauts lieux de ripaille et de convivialité. Pour mettre la mémoire et les papilles au diapason, voici un itinéraire fourmillant de découvertes, entre grandes pages, tranches d’histoire plus méconnues et art de vivre émoustillant. À partir de Montréal, on emprunte les chemins de traverse pour explorer la charmante campagne de Lanaudière avant de s’aventurer plus au nord encore, jusqu’au seuil de la Haute-Mauricie, puis de redescendre en direction de Trois-Rivières pour se sucrer le bec. Ce savoureux périple emprunte enfin le Chemin du Roy pour amorcer le retour vers Montréal. Une façon toute naturelle de boucler la boucle mémorielle sur la première route carrossable qui fut construite en Amérique du Nord.

© Michel Julien

Dans Lanaudière, une tradition parfaitement fléchée !

Qui dit Québec des traditions dit carnaval. Et qui dit carnaval de Québec dit forcément Bonhomme Carnaval. Mascotte de l’événement depuis 1954, ce personnage est reconnaissable à son bonnet rouge, son large sourire et sa non moins large ceinture fléchée. Quel rapport avec les régions du Québec Authentique? L’histoire de la ceinture fléchée, devenue le symbole même des habitants du Bas-Canada dès le XVIIIe siècle, résonne fort dans Lanaudière, tellement fort que cet élément du costume traditionnel des Canadiens-Français est devenu l’emblème de la région. La ceinture fléchée rappelle l’époque de la traite des fourrures et des premiers échanges avec les Nations autochtones. Finement tissée aux doigts, elle était portée par les coureurs des bois et autres voyageurs-canoteurs qui l’utilisaient entre autres pour soulager leur dos, mais aussi comme objet de commerce avec les Premières Nations. Les artisanes de Lanaudière, en particulier à L’Assomption où se trouvait un comptoir de traite de la Compagnie du Nord-Ouest, ont développé au XIXe siècle un savoir-faire unique qui allait donner ses lettres de noblesse à la fameuse ceinture traditionnelle aux motifs représentent des têtes de flèches flanquées d’éclairs. Un succès tel que la ceinture fléchée « made in Lanaudière » fut dès lors connue des anglophones sous le nom d’Assumption sash (ceinture de L’Assomption).

Si L’Assomption, à quelques kilomètres de Montréal, n’a plus depuis longtemps son historique poste de traite, un arrêt intéressant est à marquer dans l’arrière-pays lanaudois, à Sainte-Marcelline-de-Kildare. La Maison du Fléché Bélanger se consacre à l’art du fléché tel qu’il fut pratiqué par un brillant artisan local, Pierre Bélanger (1942-1986). Outre des expositions sur l’emblématique ceinture, on peut y suivre des ateliers de transmission de ce savoir-faire, incluant le filage et la teinture naturelle de la laine.

© Tourisme Lanaudière

La présence acadienne au Québec Authentique, un trésor méconnu

En partant de Montréal pour rejoindre la campagne bucolique de Lanaudière et devenir un pro du fléché, vous aurez préalablement croisé la ville de Terrebonne. Les férus d’histoire ne manqueront pas l’arrêt dans le Vieux-Terrebonne où le patrimoine bâti de l’Île-des-Moulins témoigne des fastes d’une des plus importantes seigneuries de l’histoire du Québec, qui célèbre 350 ans d’existence en 2023. Ils sont ensuite invités à mettre le cap au nord, vers une partie de la région où plusieurs municipalités – Saint-Jacques, Saint-Alexis, Saint-Liguori, Sainte-Marie-Salomée… – racontent une histoire tout aussi ancienne mais bien plus singulière encore. Celle des familles acadiennes qui fondèrent ici, aux XVIIIe et XIXe siècles, la Nouvelle-Acadie.

Saint-Jacques fut la première paroisse à y ouvrir ses registres après le Grand Dérangement, c’est-à-dire la déportation massive des Acadiens par le régime britannique à partir de 1755. Comme ses voisins, le village a conservé de puissantes attaches à ses racines acadiennes. Maintenu vivant par le biais de traditions et d’événements culturels, ce lien s’incarne également dans un lieu étonnant où l’arrêt s’impose pour trois raisons au moins. Premièrement, la Distillerie Grand Dérangement rend hommage, par-delà son nom, aux fondateurs de la Nouvelle-Acadie en racontant leur histoire émouvante. Il s’agit ensuite de l’unique ÉCONOMUSÉE du Québec Authentique, un lieu où la fabrication artisanale des spiritueux se dévoile du grain jusqu’à la bouteille. Enfin et peut-être surtout, vous êtes dans la première distillerie certifiée biologique au Québec. Ses produits élaborés avec des matières premières locales valent vraiment la dégustation, avec modération, mais passion!

Homme fort © Maison Louis-Cyr

Homme fort

Notre périple dans la grande et les petites histoires du Québec Authentique se poursuit un cran plus au nord, alors que les reliefs et la forêt. Cap sur Saint-Jean-de-Matha pour une rencontre d’un genre plutôt extraordinaire avec nul autre que l’homme le plus fort de tous les temps. Ce dernier, surnommé le Samson canadien, s’appelait Louis Cyr (1863-1912). Doté d’une force phénoménale depuis son plus jeune âge, il s’illustra par ses tours de force et fit même fortune, battant tous les records de son époque. Une carrière qui amena le Canadien-Français à se produire dans toute l’Amérique du Nord ainsi qu’à Londres, où il médusa une foule de 5 000 personnes en soulevant d’un seul doigt plus d’un quart de tonne et en levant de son dos une plateforme chargée à plus d’1,6 tonne, entre autres exploits. Son incroyable histoire, sa vie quotidienne et le contexte de son temps sont relatés à la Maison Louis-Cyr, une bâtisse que le héros de Lanaudière a habité avec son épouse, elle-même originaire de Saint-Jean-de-Matha.

Hommes des bois © Stéphane Jutras

Hommes des bois

De la force et du courage, il leur en fallait en grande quantité à eux aussi. Eux? Les bûcherons qui œuvraient jadis au cœur de l’hiver dans l’épaisse forêt de la Mauricie. Vous l’aurez compris, notre prochaine étape nous conduit dans la région voisine. Tout près du parc national de la Mauricie, Grandes-Piles est un village fier de son histoire, laquelle est intimement liée à la naissance de la foresterie à partir du milieu du XIXe siècle et à la drave sur le Saint-Maurice, cette grande rivière longtemps utilisée pour faire flotter les billes jusqu’à Trois-Rivières. Au Village du Bûcheron, on est plongé dans l’univers des hommes des bois d’antan. Au gré de 25 bâtiments fidèlement reconstitués, la visite guidée vous apprendra une foule de détails sur le rude quotidien des chantiers forestiers et des camps de drave traditionnels, leurs règles, les différents métiers à l’œuvre, mais aussi toute la culture qui palpitait alors grâce aux animations des guides, tous musiciens et conteurs.

© Jean-Gabriel Pothier

En Mauricie, un florilège d’épopées industrielles à retracer

En repartant en direction du sud par la route 155, on longe le cours sinueux de ce majestueux Saint-Maurice qui fut et reste si essentiel au développement de la région. La ville de Shawinigan en fait une démonstration éclatante, et de manière survoltée, puisqu’ici, la rivière est d’abord et avant tout une source incomparable d’énergie. Attrait majeur au Québec, la célèbre Cité de l’énergie se signale de loin, avec sa tour d’observation haute de 115 mètres dont le sommet offre une vue époustouflante sur la ville et son superbe environnement naturel. Ce complexe patrimonial et muséal pas comme les autres vous donnera l’heure juste concernant l’énergie sous toutes ses formes et sous un angle à la fois scientifique et ludique, que ce soit au travers d’un spectacle multimédia à grand déploiement d’effets spéciaux ou par le biais de passionnantes expositions et activités. La découverte du secteur historique, et notamment la visite de la centrale hydroélectrique Shawinigan-2 datant de 1911, sont particulièrement éclairantes. Prenez également le temps de visiter le musée dédié à l’ancien premier ministre Jean Chrétien, un enfant du pays. Assurément, le courant passera entre vous et « Shawi », et vos batteries seront rechargées à bloc pour reprendre la route en direction de Trois-Rivières.

C’est précisément à l’endroit où la rivière Saint-Maurice rejoint le grand Saint-Laurent que Boréalis vous accueille. Au milieu du XXe siècle, la Canadian International Paper (CIP) était considérée comme le plus grand moulin à papier de la planète, produisant près de 1 000 tonnes de papier journal quotidiennement. De cet imposant complexe industriel, l’un des seuls vestiges bâtis encore debout est l’ancienne usine de filtration d’eau de la CIP, flanquée de son iconique tour d’eau. C’est ici qu’a pris place ce musée inédit, à la fois pour conserver la mémoire de cette épopée singulière (l’exposition permanente « Racines et identité » est à ne pas manquer) et pour rendre hommage aux femmes et aux hommes qui travaillèrent à l’essor des pâtes et papiers de Trois-Rivières, des travailleurs de la forêt, bûcherons et autres draveurs jusqu’aux ouvriers qui œuvraient ici. Parcours extérieur interactif, aventures immersives à la carte – notamment sous de fascinantes voûtes souterraines –, ateliers et animations originales…

Vous ne verrez pas le temps passer, et pourtant on vous conseille de garder du temps pour découvrir un autre site captivant par sa valeur historique. Légèrement au nord du centre-ville de Trois-Rivières, le lieu historique national des Forges-du-Saint-Maurice n’est autre que le berceau de l’industrie sidérurgique au Canada, dont le tout premier haut fourneau fut allumé durant l’été 1738, sous le régime français. D’importantes fouilles archéologiques ont permis de restituer l’agencement et le fonctionnement de ces forges qui jouèrent un rôle majeur dans le développement de la Nouvelle-France. Expositions, spectacle immersif, parcours audio conçu par le conteur Fred Pellerin, animations en costumes d’époque : Parcs Canada y a concocté une expérience de visite hors pair!

© Michel Julien
Se sucrer le bec

Se sucrer le bec

Le fer fondu, la sueur des bûcherons et l’eau vive des rivières ne sont pas les seuls précieux liquides irriguant l’histoire du Québec Authentique. Il est temps pour notre parcours printanier de nous offrir la récompense tant attendue: le sirop d’érable, au moment même où il enchante les becs sucrés dans la chaleur des cabanes aux quatre coins du territoire. Lui aussi découle d’une très ancienne tradition populaire, puisque les Premières Nations connaissaient déjà les vertus de l’eau extraite de l’arbre à sucre, Acer saccharum de son nom latin. Les chaudrons de fer des premiers colons français ont permis dès le XVIIe siècle de transformer cette eau boisée et sucrée en sirop. L’or doré du Québec était né, et avec lui la tradition du temps des sucres, soit les festivités entourant le redoux du printemps, période où les érables coulent à flots et les chaudières fument. Les cabanes à sucre ouvrent alors leurs portes pour des repas festifs copieusement arrosés de sirop. Soupes aux pois, fèves au lard, crêpes et tires d’érable à même la neige sont toujours au cœur de la traditionnelle partie de sucre. Les options ne manquent pas en Mauricie et dans Lanaudière pour vivre cette parenthèse aussi savoureuse que conviviale.

Puisqu’on est à Trois-Rivières, on vous recommande une adresse qui honore toute l’année les délices tirés de l’érable dans une ambiance authentique à souhait, cuisine traditionnelle, musique et bonne humeur incluses: la Cabane à sucre Chez Dany. Après un tel festin, vous serez bien inspirés d’emprunter une voie royale pour le retour en direction de Montréal, car le Québec Authentique a encore de nombreuses tranches d’histoire et d’art de vivre à raconter.

Emprunter une voie royale © Fabien Proulx-Tremblay

Emprunter une voie royale

Quand sa construction est achevée en 1737, le Chemin du Roy devient la toute première route carrossable d’Amérique du Nord et le cœur même du développement de la Nouvelle-France. Reliant le Vieux-Québec à Montréal sur 280 km, cette portion de la route 138 longe le fleuve Saint-Laurent par sa rive nord et traverse, dans nos deux régions, nombre d’anciennes seigneuries, de villes et de villages, formant un circuit particulièrement riche en attraits historiques et en patrimoine bâti, mais aussi en points de vue panoramiques sur le fleuve, sans oublier les lieux de culture, les repaires gourmands et les hébergements qui méritent l’arrêt. Une façon idéale de clôturer ce savoureux road trip de printemps aux mille histoires dans les régions du Québec Authentique.

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